"Emmerder les non-vaccinés" : quelles sont les contraintes pour les personnes hostiles à la vaccination en Allemagne et en Italie

Emmanuel Macron assumait mardi 4 janvier vouloir "emmerder" les non-vaccinés contre le Covid-19. Si cette phrase a provoqué un tollé dans les rangs de l'opposition, elle témoigne d'une volonté de resserrer la vis pour pousser les non-vaccinés à prendre rendez-vous. Une stratégie que partagent plusieurs pays européens.

En Allemagne, la règle des 2G et la perspective d'une obligation vaccinale

Depuis la mi-novembre, l’Allemagne a pour la première fois interdit l’accès aux non-vaccinés à certains lieux en appliquant la règle "2G". Ce sont les initiales, en allemand, pour deux groupes : vaccinés et guéris du Covid. Finie la possibilité pour les non-vaccinés de se faire tester pour entrer dans les bars ou les restaurants, la porte leur a été fermée, tout comme dans certains lieux de loisirs. Cela vaut quand l’indice d’hospitalisation commence à s’emballer, à se tendre et atteindre le premier seuil de 3 dans la région où l’on vit. Et cette décision symboliquement forte d’exclure une partie de la population restera comme la dernière mesure prise par Angela Merkel pendant cette crise sanitaire, juste avant qu’elle ne quitte la chancellerie. Une décision qui la rend peu appréciée parmi les non-vaccinés, ou "corona-sceptique" comme on les appelle ici, parce qu’elle est pour eux synonyme de perte et d’atteinte aux liberté.

Une autre mesure avait particulièrement choqué en Allemagne, et cette fois-ci dans toute la population : le couvre-feu instauré pendant trois semaines. Angela Merkel était donc facilement la cible des manifestants, dont une frange est emmenée par le parti d’extrême-droite AfD et qui a toujours, rien de nouveau, détesté Merkel, précédemment en raison de sa politique d’accueil à l’égard des réfugiés.

Ce qu’on peut dire à son sujet comme au sujet du nouveau chancelier Olaf Scholz, c’est que l’une et l’autre n’ont pas eu et n’ont pas de mots blessants à l’égard d’une quelconque partie de la population. Ils répètent inlassablement la recommandation à aller se faire vacciner en espérant que le message finira par passer. On peut sentir tout de même une forme d’agacement chez le nouveau chancelier social-démocrate qui s’est engagé à rendre la vaccination obligatoire. Mais ce pourrait être la première promesse non-tenue du chancelier Scholz car le calendrier parlementaire semble intenable. Olaf Scholz croit néanmoins toujours possible une entrée en vigueur de cette obligation vaccinale vers la fin mars.

Cette proposition ravive aussi les manifestations dans le pays entraînant chose plus rare ici des affrontements parfois violents avec la police. Des manifestations non-déclarés qui se déroulent souvent les lundis comme ce lundi 10 janvier. Ce projet d’obligation vaccinale ne semble qu’ouvrir encore plus la brèche qui sépare désormais la population. Et pourrait aussi diviser le nouveau gouvernement de coalition puisque les libéraux du FDP n’ont aucune envie d’obliger personne. C’est dans leur ADN. Cela pose question aussi chez de nombreux élus des Verts mais aussi parmi les sociaux-démocrates du SPD, le parti du chancelier Scholz.

L'Italie rend la vaccination obligatoire pour les plus de 50 ans

En Italie, le gouvernement aussi serre la vis contre les citoyens non-vaccinés. Depuis ce matin, ils n'ont plus le droit de faire grand-chose. La mesure la plus forte c'est l'interdiction de prendre le bus, le métro, le train, l'avion. Impossible d'aller travailler en transports en commun par exemple, il faut prendre sa voiture, un vélo, un taxi, etc. Une dérogation seulement : les transports scolaires !

Plus possible non plus d'aller au restaurant même en terrasse, il faut montrer son pass vaccinal pour s'installer à table et même pour prendre un café "al volo", au comptoir comme le font nombre d'Italiens. Pas de salle de sport non plus, impossible d'aller nager dans une piscine, ou d'aller au cinéma ou au théâtre. Il faut même un pass vaccinal pour entrer dans un musée. Et on oublie également le tourisme ou les déplacements pour les non-vaccinés car les hôteliers n'ont plus le droit de les accepter.

Les Italiens que notre correspondant a pu rencontrer y sont tous favorables - il faut dire qu'ils étaient tous déjà vaccinés - ils se prononcent même pour l'obligation vaccinale pour toute la population. Et c'est en fait l'objectif de Mario Draghi. Sauf qu'il doit composer dans son gouvernement avec l'extrême-droite de Matteo Salvini et avec le Mouvement 5 Étoiles, qui s'y opposent tous les deux. Alors on y va petit à petit avec, pour l'instant, une obligation seulement pour les plus de 50 ans, pour tous les personnels et enseignants de la crèche à l'université, pour le personnel sanitaire, les forces de l'ordre et l'armée.

Pour les plus de 50 ans, une amende spéciale de 100 euros a été mise en place par le fisc lui-même, qui vous retrouvera pour vous faire payer. Cette amende forfaitaire s'ajoute à celles déjà en vigueur, mais qui dépendent des contrôles des forces de l'ordre. Celles-ci vont de 400 à 1500 euros.

Cette stratégie plus répressive semble en tout cas fonctionner, selon le général Figliuolo qui coordonne la campagne de vaccination. Samedi dernier, 70 000 premières doses ont été administrées, soit 60% de plus que la moyenne quotidienne. Et cela se voit surtout chez les plus de 50 ans, dont l'obligation vaccinale a été annoncée il y a deux jours : le nombre de primo-injections chez les plus de 50 ans a été multiplié par trois ! Pour eux, il n'y a pas de file d'attente et les centres de vaccination sont même ouverts la nuit.