C’est une anecdote qu’aime bien rappeler avec une petite fierté Jacques Auzou, le maire de Boulazac-Isle-Manoire : « Savez-vous que chez Cofidur, à Boulazac, on a fabriqué des cartes électroniques qui équipent des terminaux de la bourse de Hong Kong. »
Nicolas Djerbi, le directeur du site, précise le poids de l’exportation dans la société : « Via les entreprises pour lesquelles nous sommes sous-traitants, nous estimons entre 30 et 40 % de nos fabrications qui partent à l’étranger. L’export en direct, c’est autour de 15 %, essentiellement en Europe, avec la Suisse et la Belgique comme principaux clients. »
Cofidur est ce que l’on appelle dans le jargon industriel une EMS, Electronic Manufacturing Services, un sous-traitant pour des fabricants d’équipements. L’entreprise de Boulazac, qui s’appela Compagnie des signaux puis Centre électronique de Périgueux, est entrée dans le giron du groupe Cofidur depuis la fin des années 1980. Elle y tient depuis sa place en représentant 150 des 400 salariés de ce groupe qui a son autre usine et son siège principal à Laval, en Mayenne. Il est coté en bourse à Euronext Paris.
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D’Ariane à Leroy-Somer
Des cartes montées chez Cofidur se retrouvent dans la fusée Ariane ou dans des Airbus, mais également dans des produits vendus dans le monde entier par des entreprises exportatrices comme Thalès, Safran, Alstom, Lectra, ainsi que dans les moteurs électriques du leader mondial Leroy-Somer. « Toute l’électronique qui pilote ces moteurs est fabriquée chez nous », souligne Nicolas Djerbi.
Les agréments pour l’aéronautique et le spatial, la défense et le médical permettent de se situer sur de nombreux marchés exportateurs. Le ferroviaire est en plein développement pour compenser des marchés comme l’aviation qui tournent au ralenti. « Nous sommes très présents dans de nombreuses usines à travers des machines outils et de la robotique. »
Cofidur est par ailleurs un des leaders de l’implantation de leds pour l’éclairage public, autre secteur qui travaille à l’export dans toute l’Europe. Le groupe mise sur son offre de solution globale qui va des études aux tests de résistance, très important pour les produits électroniques placés en milieux hostiles. Savoir comment les pièces vont se comporter de - 40 à + 110 degrés est un savoir-faire valorisé à Boulazac.
L’automatisation de l’usine est très visible quand on traverse les halls où l’implantation des composants n’est souvent plus que surveillée et testée par une présence humaine. Le temps où des petites mains les implantaient à la chaîne et au fer à souder est quasiment révolu, excepté pour de toutes petites séries très techniques pour lesquelles Cofidur conserve une expertise reconnue.
La pénurie de composants
Comme une grande partie de l’industrie, Cofidur a souffert en 2020 des arrêts de l’économie au moment du premier confinement. « Nous nous sommes retrouvés un moment à 15 dans l’entreprise », se souvient Nicolas Djerbi.
Une mauvaise passe qui est en train d’être remontée en 2021, avec une rentabilité déjà retrouvée au premier semestre et qui devrait se confirmer au second, même si la pénurie mondiale de composants électroniques commence à se faire sentir sérieusement, pouvant impacter entre 10 et 20 % du chiffre d’affaires du groupe. « Même si nous sommes moins touchés que l’automobile, nous devons nous battre pour nos approvisionnements. Les prix flambent et nous essayons de limiter les retards pour nos clients. »
Pour pouvoir continuer à investir dans son plan d’usine digitale 4.0, Cofidur a bénéficié d’un coup de pouce du plan de relance de l’État avec une enveloppe de 550 000 euros. Ils serviront notamment pour poursuivre la robotisation des lignes de fabrication dans lesquelles près de 2 millions d’euros devraient être consacrés sur deux ans. Le recrutement est aussi un axe fort avec toujours la difficulté de trouver et de garder des opérateurs de production.
Un chiffre d’affaires de 55 millions d’euros est espéré pour cette année, encore loin des 68 millions de l’année de référence 2019. Mais la remontée est en cours et les carnets de commandes ont déjà plusieurs mois d’avance. L’entreprise regarde vers l’avant en lançant un plan interne baptisé « Ambition 2025 », misant sur la croissance, la modernisation et le capital humain de ses équipes.
Les cadres ont repris l’entreprise
L’actualité 2021 de Cofidur a été marquée par la transmission de la société à sept cadres opérationnels qui ont repris 100 % de la société EMS Finance, via une société baptisée Dordogne Mayenne Développement, détenant ainsi 49,5 % de la holding Cofidur SA. « Cette acquisition va permettre de pérenniser l’activité et la structure actuelle avec les sites de Laval et Périgueux, ainsi que de dynamiser le groupe », indiquait le communique annonçant la transmission. L’entreprise cinquantenaire tournait une nouvelle page.
« Les actionnaires historiques ont restructuré le groupe pour prévoir son avenir et ont préféré le céder à ses dirigeants plutôt qu’à des financiers », résumait en juillet le PDG Laurent Dupoiron peu après cette réorganisation dont il louait la « stabilité » qui devrait rassurer personnels et clients. Il dirige l’entreprise aux côtés de sa directrice financière, des directeurs des ressources humaines, des deux sites de fabrication, du développement et commercial.
Dans cette nouvelle gouvernance, le directeur du site de Périgueux/Boulazac, Nicolas Djerbi, tient toute sa place dans l’équipe de direction. Pour cet électronicien périgourdin, entré comme stagiaire, qui a gravi depuis vingt ans tous les échelons de l’entreprise, c’est la suite d’une très belle histoire dans laquelle il est très investi, notamment pour recruter de nouveaux collaborateurs à tous les niveaux.
« La bonne nouvelle, c’est de voir arriver en Dordogne des personnes très compétentes, notamment dans l’encadrement. Ils arrivent de toute la France. »