Les bikeuses de Rihanna envoient valser les codes de la lingerie

Depuis 2018, avec sa ligne Savage avec Fenty, Rihanna met le secteur de la lingerie sens dessus dessous. La diva RnB de la Barbade a d’ailleurs largement contribué à mettre fin à des décennies de diktats qui convergeaient vers une silhouette archétypale (la liane caucasienne à jambes interminables) et une image de la femme réductrice à souhait, celle d’objet (rutilant) du désir (masculin), chair offerte à grand renfort de poses aguicheuses ou languides et de bouches entrouvertes.Les bikeuses de Rihanna envoient valser les codes de la lingerie Les bikeuses de Rihanna envoient valser les codes de la lingerie

La marque qui a le mieux incarné ce fantasme congelé de la bombe anatomique est Victoria’s Secret, dont les fameux défilés à «anges» ont rassemblé des centaines de millions de téléspectateurs de 1995 à 2019. Quand soudain, rattrapée par des révélations accablantes sur les comportements de deux de ses piliers, son fondateur-directeur général et son ex-directeur du marketing (accusés entre autres de propos homophobes et transphobes, harcèlement sexuel…), l’enseigne détenue par le groupe américain Limited Brands a mis fin au kitschissime carnaval en petites culottes. Et dans la foulée, subitement perméable à la réalité (merci aux mouvements #MeToo et pro-inclusivité mais aussi aux chiffres de ventes en chute libre), elle a opéré un changement d’offre et surtout marketing drastique : exit les «anges», place à des «ambassadrices» (dont la footballeuse Megan Rapinoe, la skieuse acrobatique Eileen Gu, la mannequin grande taille britannique Paloma Elsesser) aux antipodes des égéries originelles. Mais le mouvement est général. Aucun acteur de la lingerie ne saurait rater le virage en cours, ne serait-ce que par opportunisme.

L’éloge d’une attitude

Rihanna reste néanmoins aux avant-postes de ce changement de paradigme. La diversité qu’elle prône depuis le départ, avec cette ligne qui met le sexy (de préférence incendiaire) à portée de toutes les formes (disponible du XS au XXXL) et médiatisée par des mégashows et campagnes publicitaires où dominent les femmes noires, se double de l’éloge d’une attitude : l’affirmation de soi, la fierté, et pourquoi pas la provoc. Les femmes Savage associées à Fenty twerkent plutôt qu’elles minaudent, leur séduction est assaut et non soumission – et tant pis si au passage, la très datée et nébuleuse notion de «bon goût» est définitivement enterrée, sans fleurs ni couronnes. La lingerie par «BadGalRiRi» (son blaze Instagram) est un programme politique.

Les bikeuses de Rihanna envoient valser les codes de la lingerie

La nouvelle collection dévoilée ces jours-ci enfonce le clou. Elle a pour figures de proue les Caramel Curves, un gang de bikeuses noires de la Nouvelle Orléans qui n’ont clairement besoin de personne en Harley ou autre bécane. Les mots d’ordre de ces pétroleuses, «mères de famille, entrepreneuses, figures de la communauté» : se saper et se pomponner comme jamais, mettre les gaz et faire tourner les têtes. Elles ont de quoi faire avec ces bodies, soutiens-gorge, jarretières, bikinis, shorts, culottes et autres strings qui abondent en dentelle, fleurs, et couleurs bien flashy – vert et orange fluo, pourpre. Les visuels de la campagne sont réjouissants, ces corps qui débordent en toute décomplexion, carcans résolument explosés par les motardes-divas qui se revendiquent «badass» (dures à cuire). Le clip est une ode à la confiance en soi, à la sororité, et à la Nouvelle Orléans.

Cet été 2021 est de fait prolifique pour la femme d’affaires Rihanna : le lancement du premier parfum Fenty est annoncé pour le 10 août. Côté musique, la cadence est moindre. Son dernier album, Anti, date de janvier 2016, et les rumeurs qui annonçaient le neuvième pour cette année restent pour l’heure invalidées par l’intéressée.

Récit

Rihanna-LVMHFenty, vidi, vici ?

Société
15 mai 2019